Quelle orientation est la plus confortable pour le cheval pendant le transport ? Padalino et al, 2012

Résumé

L’effet des différentes orientations pendant le transport sur les variations physiologiques et comportementales des chevaux

Les chevaux sont amenés à être transportés régulièrement au cours de leur vie. Le transport est source de stress pour le cheval à cause de nombreux facteurs : l’embarquement, le débarquement, le changement d’environnement, l’enfermement, l’isolement, les vibrations, etc (Waran, 1993).
Cependant qu’en est-il de la position pendant le transport ? Les chevaux voyagent-ils mieux dans le sens de la marche, perpendiculairement à la route ou dos à la route ?
Cette étude évalue l’impact des différentes orientations du cheval pendant le voyage mais aussi la faculté de récupération jusqu’à 4h après le voyage.

Protocole

Les 12 trotteurs américains de l’étude effectuent chacun 3 voyages de 200 km en camion, en étant orientés une fois dans le sens de la marche, une fois perpendiculairement à la route et une fois dos à la route.

Il s’agit toujours du même trajet avec le même conducteur et des conditions climatiques semblables.
Les chevaux ont été examinés à 5 reprises : au repos dans leur boxe, à l’embarquement, au débarquement, au repos dans leur boxe 2h après le transport, et au repos dans leur boxe 4h après le transport. L’examen consiste en la mesure de la fréquence cardiaque et de la fréquence respiratoire, la prise de température et une prise de sang. Une observation comportementale est aussi faite à ces 5 moments.

Résultats

Les chevaux ayant voyagé dans la position perpendiculaire à la route éprouvaient une fatigue musculaire plus importante que les autres : ils avaient besoin de 4h pour retrouver un taux de créatine kinase normal, signe d’un effort musculaire notable (cf encart bleu).
La position dans le sens de la marche a généré du stress, traduit par une augmentation de concentration de cortisol au déchargement. (cf encart bleu).
La position dos à la route n’a pas modifié les paramètres physiologiques par rapport à l’analyse des chevaux au boxe mais l’observation montre davantage de mouvements chez ces chevaux lors du voyage en comparaison aux deux autres positions.

Les auteurs concluent que pour les trotteurs américains habitués à voyager, le voyage dos à la route est la position la moins stressante pour un voyage de 200 km.

En savoir plus sur le protocole

Quel était le protocole exactement?

Chevaux et transport

L’étude concerne 12 trotteurs américains, 4 hongres, 4 entiers et 4 juments âgés de 3 à 7 ans.
Ils vivent chacun 3 transports dans 3 positions : dos à la route, dans le sens de la marche, perpendiculairement à la route. Le compartiment du camion fait toujours la même dimension (2,3 m par 0,85 m). Les chevaux sont attachés avec une longe de 50 cm et voyagent par deux.

Procédure

  • les chevaux effectuent leur entraînement le matin
  • l’expérience commence à 12h avec le premier examen dans leur box (T0)
  • à 12h30 a lieu l’embarquement en camion (T1)
  • à 15h30, après avoir parcouru 200km en camion, les chevaux reviennent dans leur écurie et sont débarqués (T2)
  • ils sont emmenés dans un boxe qu’ils ne connaissent pas, comme en situation réelle de déplacement pour une course; un examen a lieu 2h après le débarquement (T3)
  • le même examen est répété 4h après le débarquement (T4)

Figure 2: le protocole
Le groupe de contrôle comprend les mêmes chevaux qui n’ont pas effectué de transport mais qui ont été privés de nourriture et d’eau pendant 3h, comme pour les chevaux ayant voyagé.

Observations comportementales

Les chevaux sont filmés à l’embarquement et au débarquement pour voir s’il y a ou non des réticences.
Pendant le voyage, deux personnes qui se trouvent également dans le camion notent et quantifient les mouvements des chevaux.
Une fois de retour dans un boxe, les chevaux sont observés 4h par deux périodes de 2 heures, les observateurs renseignent le temps passé debout, en position de repos, à manger du foin, etc.

En savoir plus sur les résultats

Quels sont les résultats ?

–Le transport reste une source de stress quelle que soit l’orientation du cheval pendant le transport qui se traduit physiologiquement par une augmentation de la fréquence cardiaque et du taux d’hémoglobine (favorisant l’apport d’oxygène aux muscles, sollicités pendant le transport).
–Par ailleurs, en comparaison au groupe contrôle qui n’a pas voyagé, les chevaux ayant voyagé, une fois de retour au boxe, mangent leurs concentrés plus vite et passent plus de temps à manger du foin que le groupe contrôle. Le groupe contrôle a eu un comportement exploratoire plus tôt dans leur box.
–L’analyse vidéo à l’embarquement et au déchargement n’a montré à aucun moment une réticence de la part des chevaux.
–Dans cette étude, les valeurs maximales de cortisol (ndlr hormone du stress) ont été enregistrées au déchargement chez les chevaux voyageant dans le sens de la marche. Ils n’ont probablement pas réussi à s’adapter aux mouvements du camion dans cette position. Giovagnoli (2008) a signalé que dans cette orientation, les chevaux ont tendance à tomber plus facilement vers l’avant; la peur de la chute peut causer plus de stress chez les chevaux.
–Gibbs et Friend (1999) ont noté que les chevaux ont montré une légère préférence pour voyager à environ 45° par rapport au déplacement du véhicule; cependant ici les chevaux voyageant en diagonale ont développé une légère fatigue musculaire, confirmée par des variations dans les concentrations de créatine kinase à T3.
–Les chevaux ont fait beaucoup plus de mouvements quand ils voyageaient dos à la route, mais à la fin du voyage et dans les 4 heures suivantes, l’examen clinique n’a pas révélé de variation des paramètres physiologiques par rapport à T0.
–Les auteurs concluent qu’une position dos à la route est moins stressante pour les chevaux, car ils arrivent mieux à conserver leur équilibre. (Cregier, 1981, 1982). De plus, une étude menée par Kusunose et Torikai en 1996 montre que la position dos à la route était volontairement choisie lors de voyages où les chevaux n’étaient pas attachés.

Références

Références

Cet article a été résumé par Marie Lejeune. Il a été relu par Angélique Decarpentry et Stéphanie Ronckier. Les illustrations sont de Claire Béjat. La photo est d’Émilie Lameloise. Cet article a été édité par Stéphanie Ronckier.

Référence complète de l’article

Padalino, B.; Maggiolino, A.; Boccaccio, M.; Tateo, A. (2012). « Effects of different positions during transport on physiological and behavioral changes of horses »,Journal of Veterinary Behavior, 7, 135-141.
L’article original

Bibliographie citée par l’article

Cregier, S.E. (1981) « Alleviating road transit stress on horses » Anim. Regulat. Stud., 3, 223–227.
Cregier, S.E. (1982) « Reducing equine hauling stress: a review » J. Equine Vet. Sci. 2, 187–198.
Gibbs, A.E., Friend, T.H. (1999) « Horse preference for orientation during transport and the effect of orientation on balance ability », Appl. Anim. Behav. Sci. 63, 1–9.
Giovagnoli, G. (2008) Manuale teorico pratico sul trasporto del cavallo 1st Ed. Mursia, Milano, Italy.
Kusunose, R., Torikai, K. (1996) « Behavior of untethered horses during vehicle transport », J. Equine Sci. 7, 21–26.
Waran, N.K. (1993) « The behaviour of horses during and after transport by road », Equine Vet. Educ. 5, 129–132.

La créatine kinase :

La créatine kinase joue un rôle dans l’apport d’énergie aux muscles et dans la contraction musculaire. Sa présence élevée traduit donc l’effort musculaire nécessaire aux chevaux pour s’équilibrer durant le transport.

Le cortisol :

Le cortisol est vulgairement appelé « l’hormone du stress ». Il aide à maintenir le taux de glucose dans le sang pour nourrir les muscles, le cœur, le cerveau, dans une situation de stress prolongée.

[Résumé] Effets de l’orientation pendant le transport sur le cheval – Padalino et al., 2012
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